Les chorégraphes auteurs de création jeune public sont-ils des auteurs de seconde zone ?
En tant que syndicat représentant les auteurs chorégraphiques, nous nous étonnons d’un état de fait signalé par de nombreux témoignages : la création chorégraphique en direction du jeune public ne semble pas être considérée comme ayant une valeur artistique reconnue.
Plusieurs constats nous semblent nécessaires
D’après l’étude récente de l’ONDA sur la diffusion de la danse en France, il est apparu que parmi les pièces chorégraphiques qui se jouent le plus, certains spectacles jeune public sont très placés.
Pourtant il semble que peu considérés comme des créateurs à part entière, ces auteurs n’obtiennent que très rarement une aide à la création. Beaucoup d’entre eux ne trouvent pas de soutien de certaines DRAC, sans argumentation valable, laissant souvent ces démarches de créations dans une précarité injustifiée. Comme si, au regard des crédits disponibles, leurs demandes d’aides passaient après toutes les autres demandes de subvention.
Les chorégraphes œuvrant pour le jeune public créent des univers modulables pouvant s’adapter à des espaces hors normes, portant ainsi le spectacle vivant dans des lieux qui ne sont pas dotés d’équipements culturels, dans des zones moins identifiées et touchant ainsi un grand nombre d’enfants, futurs spectateurs de demain qui n’auraient pas accès à la création chorégraphique.
Nous constatons que, souvent, les dates jouées dans ces lieux atypiques ne sont pas prises en compte dans le bilan de nombreuses tutelles. Comme si une pièce chorégraphique jeune public ne pouvait avoir de la valeur à leurs yeux que sur un plateau de Scène Nationale! Ces œuvres sont-elles des créations mineures ?
Ces mêmes auteurs sont pourtant souvent considérés comme compétents pour s’investir dans des actions d’Education Artistique et Culturelle (EAC). Bien souvent les DRAC sont ravies de faire appel aux acteurs de la création jeune public pour assumer des ateliers en EAC, qui demandent une bonne connaissance de cet univers mais ils ne s’engagent pas à aider les auteurs dans leur création en elle-même. Ce qui nous apparaît absurde puisque ateliers et projets découlent d’une création et non l’inverse : la création chorégraphique devrait être au contraire un socle sur lequel se structure une politique culturelle.
A la production fragile, économiquement, de ces créations est souvent opposée la non-rentabilité de sa diffusion (places à très bas prix, jauges limitées, etc.). Ces arguments tiennent peu face à ce que l’on observe sur le terrain et ne servent qu’à obliger les créateurs à la production de formes légères, avec peu d’interprètes, des temps de production réduits.
Les déclarations publiques répétées sur l’importance de la jeunesse, sur la place de l’art et des artistes dans l’éducation et la construction de l’individu doivent être suivies d’effets réels.
Pour cela, un soutien à sa juste valeur serait la seule réalité tangible qui puisse manifester l’importance de la création en direction du jeune public.
Aujourd’hui, il nous semble que la reconnaissance de ce vrai travail d’auteur devrait passer par :
• Une augmentation des aides ciblées sur la production d’œuvres chorégraphiques pour le jeune public.
• La création de Centres Chorégraphiques Nationaux pour l’Enfance et la Jeunesse (comme cela existe pour le théâtre), produisant et accueillant des œuvres dédiées.
• Une présence plus grande de la danse dans la programmation des Scènes Conventionnées jeune public.
• Des représentants DRAC jeune public ainsi que des experts DRAC jeune public.
• La prise en compte par les tutelles de toutes les dates jouées, quel que soit le lieu de représentation.