Texte d’une conférence de Michel Foucault donnée en 1970 à l’Université de Buffalo (USA)
M. Michel Foucault, professeur au Centre universitaire expérimental de Vincennes, se propose de développer devant les membres de la Société française de philosophie les arguments suivants : «Qu’importe qui parle ?»
En cette indifférence s’affirme le principe éthique, le plus fondamental peut-être, de l’écriture contemporaine. L’effacement de l’auteur est devenu, pour la critique, un thème désormais quotidien. Mais l’essentiel n’est pas de constater une fois de plus sa disparition ; il faut repérer, comme lieu vide – à la fois indifférent et contraignant – , les emplacements où s’exerce sa fonction.
1° Le nom d’auteur : impossibilité de le traiter comme une description définie ; mais impossibilité également de le traiter comme un nom propre ordinaire.
2° Le rapport d’appropriation : l’auteur n’est exactement ni le propriétaire ni le responsable de ses textes ; il n’en est ni le producteur ni l’inventeur. Quelle est la nature du speech act qui permet de dire qu’il y a oeuvre ?
3° Le rapport d’attribution: L’auteur est sans doute celui auquel on peut attribuer ce qui a été dit ou écrit. Mais l’attribution – même lorsqu’il s’agit d’un auteur connu – est le résultat d’opérations critiques complexes et rarement justifiées. Les incertitudes de l’opus.
4° La position de l’auteur : Position de l’auteur dans le livre (usage des embrayeurs ; fonctions des préfaces ; simulacres du scripteur, du récitant, du confident, du mémorialiste). Position de l’auteur dans les différents types de discours (dans le discours philosophique, par exemple). Position de l’auteur dans un champ discursif (qu’est-ce que le fondateur d’une discipline ? que peut signifier le « retour à… » comme moment décisif dans la transformation d’un champ de discours ?).